Les agressions sexuelles sont-elles plus fréquentes chez les femmes avec TSA ?
Dans mon cabinet, je reçois régulièrement des femmes dans le cadre d’une démarche diagnostique de Troubles du Spectre de l’Autisme.
Dans une premier temps, je les rencontre pour évaluer leur sensorialité et les impacts de celle-ci dans leur vie quotidienne. Ceci est l’un des critères diagnostic du DSM-5.
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En effet, lors de l’entretien, je découvre que toutes ces femmes, ou presque toutes, ont subi un viol, des attouchements, un ou plusieurs rapports sexuels non désirés.
Coïncidence ou réalité ?
Études des violences sexuelles chez les femmes avec TSA
Notons que des études sur les violences sexuelles faites aux femmes porteuses de TSA existent.
D’ailleurs, plusieurs études démontrent que ce constat est malheureusement une réalité.
9 femmes sur 10 avec un diagnostic de TSA ont subi des violences sexuelles.
Comment sont définies les violences sexuelles ? Nous parlons dans ce cas :
- Des viols,
- Des tentatives de viol,
- Des attouchements non désirés
En France, on retrouve un taux de 14,47 % de femmes (sans TSA) ayant subi des violences sexuelles au cours de sa vie.
Dans le monde, le taux est estimé à 30%. Ces chiffres sont bien évidemment insupportables.
Ils sont déjà trop importants mais ils explosent lorsqu’une femme est porteuse de TSA !
En effet, les taux augmentent et atteignent 88,4%.
Dans ce paragraphe, je vous présente une étude récente, datant de 2022.
👉 Elle est conduite par :
- le Dr David Gourion, psychiatre,
- Mme Séverine Leduc, psychologue,
- Mme Elisabeth Reyes, professeure en biologie pour Auticonsult
- et Mme Fabienne Cazalis, chercheure au CNRS.
Sur un total de 225 participantes, 90% ont été victimes de violences sexuelles.
L’étude a été proposée à des femmes porteuse de TSA, résidant en France.
Des questions ouvertes étaient posées ainsi que des questions à choix multiples.
🚨 Certaines personnes avaient pu dire ne pas avoir subi d’agressions sexuelles lors des réponses libres alors qu’elles avaient eu des rapports sous contrainte.
Ces notions ne sont pas toujours suffisamment claires pour les personnes avec TSA.
✅ L’étude s’intéresse aux conséquences des violences sexuelles et aux stratégies de prévention pour les éviter.
Quels sont les résultats de cette étude ?
Les premières agressions ont lieu avant l’âge légal du consentement pour 49% des victimes :
- 19% ont moins de 9 ans,
- 30 % ont entre 10 et 15 ans,
- 10% ont entre 16 et 18 ans,
- 26% entre 19 et 30 ans,
- 2% ont plus de 30 ans.
Les jeunes filles avec un TSA ont souvent une puberté plus précoce que les autres. Cela augmente le risque de violence sexuelle.
Plus les violences sexuelles ont lieu tôt, plus le risque de re-victimisation est important et plus le risque de syndrome post-traumatique est élevé.
- 75% de l’échantillon de l’étude a subi des agressions sexuelles à plusieurs reprises.
- Pour 40% d’entre eux, cela s’est produit avec le même agresseur.
- Pour 56%, les agressions ont été produites par des personnes différentes.
Les stratégies utilisées par les agresseurs diffèrent en fonction de l’agression.
Lors d’attouchements, les agresseurs profitent d’un moment opportun où la victime n’est pas en capacité de se défendre.
Pour les viols et tentatives de viol, les agresseurs utilisent la manipulation et l’ascendant psychologique pour agresser leur victime.
Les stratégies de forçage physique sont peu utilisées envers les personnes avec un TSA.
Après leur agression, 75% des victimes n’ont pas porté plainte. 55% n’ont même pas évoqué leur agression.
Certaines n’avaient pas conscience d’avoir été agressées par manque de cognition sociale.
Sur les personnes qui ont rapporté leur agression, 26% n’ont pas été cru.
❌ Sur les victimes qui ont été crues, seules 15% ont porté plainte et ont eu des soins.
Conséquences des agressions sexuelles pour les personnes avec un TSA
Le risque de symptômes de stress post-traumatique est élevé, et ceci en lien avec la sévérité du TSA.
Nous retrouvons :
- Une dépression chez 62% de ces femmes,
- Une anxiété chez 56% d’entre-elles
- Et un syndrome de stress post-traumatique chez 26% de l’échantillonnage.
👉 6 mois après l’agression :
- des troubles du sommeil sont présents chez 48% des victimes,
- un dégoût pour la sexualité chez 46%
- et des automutilations chez 31%.
L’étude met aussi en évidence une corrélation entre l’importance des particularités sensorielles et le risque d’être victime d’agression sexuelle.
Les hypersensibilités sensorielles fréquentes chez les personnes avec un TSA peuvent les stigmatiser.
Elles sont plus facilement repérables par des agresseurs.
De plus, le syndrome de stress post-traumatique augmente les sensibilités sensorielles.
Celles-ci entretiennent les symptômes du stress post-traumatique.
Il est mis en évidence que c’est essentiellement la vulnérabilité de la personnes TSA qui augmente son risque de subir des violences sexuelles.
Ce ne sont pas ses particularités d’interactions sociales ou de communication.
👉 Ce constat est mis en évidence en comparaison aux femmes porteuses de TDAH (Trouble Déficitaire de l’Attention avec/sans Hyperactivité).
En effet, elles ont aussi un taux de risque de violences sexuelles nettement supérieur aux autres femmes (60% selon l’étude de Gotby et al., 2018)
Que faire pour aider les femmes avec TSA ?
Nous savons que l’éducation sexuelle auprès des victimes a peu d’efficacité.
👉 Lors des faits, elles sont le plus souvent figées, choquées et ne peuvent pas empêcher l’agression.
- 10% pensent que rien n’aurait pu empêcher leur agression.
- 22% pensent que les agresseurs les ont repérés à cause de leur vulnérabilité.
- 17% aurait aimé apprendre des stratégies d’affirmation de soi.
- 8% disent qu’elles auraient voulus apprendre des techniques de repérage de situations ambigües avec un homme.
- 10 % pensent que les familles de personnes avec TSA devraient être averties de ce risque plus élevé de subir une agression sexuelle.
Enfin, certaines pensent que les familles et les institutions devraient être plus vigilantes.
Une sensibilisation et un apprentissage des comportements sexuels respectueux, du libre consentement et de l’intimité, doivent être pensés.
Ce constat existe spécifiquement auprès des personnes avec TSA, mais aussi auprès de la population générale.
Pour cela, l’Organisation Mondiale de la Santé a établit un programme de prévention contre les violences sexuelles faites aux femmes.
👍 Il s’intitule RESPECT :
- R. Relationship skills strengthened. Les relations interpersonnelles doivent être développées dans la communication, la gestion des conflits et la prise de décision.
- E. Empowerment of women. L’autonomisation des femmes doit se faire au niveau économique et social.
- S. Services ensured. Les victimes de violence doivent accéder à la santé, à la loi, à la police et aux services sociaux.
- Poverty reduced. Des stratégies doivent être mises en place pour limiter la pauvreté des femmes.
- Environments made safe. Des efforts doivent être faits pour créer des écoles, des espaces publics et des environnements de travail sécures.
- C. Child and adolescent abuse prevented. Les relations familiales doivent être encouragées pour limiter les agressions chez les enfants.
- Transformed attitudes, beliefs and norms. Les stéréotypes, les croyances et les attitudes sexistes doivent évoluées.
✅ Je vous invite à cliquer sur ce lien pour accéder à l’étude de 2022. Vous y trouvez également d’autres liens pour accéder aux différentes études sur le sujet. Bonne lecture!